Envoyé le 02-10-2022 à 12:33
Luca De Meo (Renault) et Carlos Tavares (Stellantis) voient la France comme un pays "autophobe"
Lors d'un entretien croisé au Parisien, les patrons de Renault et Stellantis constate avec regret l'image négative de la voiture en France. Ils veulent créer un "forum de la liberté de mouvement" .
Dans deux semaines, le salon de l'Automobile ouvrira ses portes à Paris, l'une des villes d'Europe où la présence des voitures est de moins en moins appréciée. Dans un entretien croisé publié par Le Parisien, Carlos Tavares, PDG de Stellantis (ex-PSA) et Luca De Meo, DG de Renault, regrette l'image négative des automobiles et l'impact sur la "liberté de mouvement".
"Pourquoi avons-nous autant de Français amoureux de leur automobile dans un pays fondamentalement autophobe?", s'interroge Carlos Tavares."J’ai travaillé en Allemagne, chez Volkswagen et Audi. Là-bas, il y a une fierté de l’industrie automobile qui n’existe pas en France", ajoute Luca De Meo qui constate que la voiture n'a plus sa place en ville.
"Haïr" l'automobile, pour nous c'est "game over"
Selon les deux dirigeants, les villes conçues il y a des siècles ou des décennies ne sont pas adaptées à l'explosion des mobilités urbaines.
"Certains —parce que circuler aujourd’hui n’est pas évident du tout, parce que dans certaines agglomérations la densité de population est sans précédent —ont commencé à prendre l'automobile en grippe. J’ai toujours dit que si les gens commençaient à haïr notre produit, c’était 'game over'", regrette le patron de Renault.
"Nous sommes au contact d’une infrastructure qui est l’une des plus vieilles du monde. Cette voie-là [Il se tourne vers la route, face au château de Versailles où a eu lieu cette rencontre, NDLR] a été construite il y a peut-être 450 ans, ajoute Luca De Meo. "Faire circuler des voitures propres dessus, c’est comme si l’on voulait passer un film de Netflix sur un GSM d’il y a vingt ans".
En effet, désormais pour les constructeurs, il s'agit de proposer des véhicules électriques pour remplacer les modèles thermiques. En juin dernier, le Parlement européen a approuvé la proposition de Bruxelles de réduire à zéro les émissions des automobiles neuves à partir de 2035. Seuls les véhicules électriques seront autorisés à la vente, à l'inverse des voitures thermiques et hybrides. Mais pour les dirigeants, ces décisions ne tiennent pas compte des réalités.
Dommage, quand même, d’avoir pris le sujet à l’envers, en commençant par la fabrication des voitures, et en laissant de côté la question de l’énergie, et celle des infrastructures", déclare Carlos Tavares.
La question repose aussi sur le ticket d'entrée pour s'offir un véhicule électrique. Pour s'en offrir une, les tarifs vont environ de 20.000 pour une petite citadine, à près de 100.000 euros pour une routière. Des tarifs que ne peuvent pas se permettre une majorité d'automobilistes.
"Si les véhicules électriques sont chers, ils seront élitistes, la classe moyenne ne pourra pas y accéder, et nous aurons un problème de stabilité sociale. Au passage, faute d’obtenir les volumes suffisants, nous n’aurons pas non plus d’impact sur la planète" note Carlos Tavares.
"Nous sommes encore dans une phase de rupture technologique, pendant laquelle, par définition, les nouveau produits sont chers". (...) Aujourd’hui, des privilégiés qui ont les moyens, un garage et une borne à la maison peuvent s’offrir le véhicule électrique. C’est politiquement incorrect de le dire comme ça", ajoute Luca De Meo en promettant de "démocratiser le véhicule électrique".
La voiture électrique pour tous trouvera-t-elle sa place dans la circulation urbaine? C'est un doute que soulève Carlos Tavares.
"Lorsque nous n’aurons plus que des voitures propres, sûres et abordables, continuera-t-on d’imposer une pression sur l’automobile?""Nous sommes là pour proposer des solutions, à condition que la société accepte que la liberté de mouvement individuelle, familiale, et professionnelle, reste un axe fondamental de notre 'lifestyle'. Pour que ce sujet-là puisse être débattu, nous allons créer un forum de la liberté de mouvement", a annoncé le patron de Stellantis."Si tu veux, je participe", propose Luca De Meo. "Bien sûr, je t’invite!", a répondu Carlos Tavares.
Lundi, lors de la conférence de presse de présentation du projet de budget 2023, Bruno Le Maire a évoqué la création d'un bonus écologique réservé aux voitures électriques produites en Europe. Le ministre de l’Economie a tracé deux pistes de réflexion pour flécher le bonus: "des véhicules produits sur le territoire européen ou strictement conformes aux nouveaux standards environnementaux".
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Si on parlait voiture électrique...
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